Pensionnaire régulier de première division dans les années 50 et 60, le Racing Club Municipal de Toulouse est habitué à naviguer dans le ventre mou du championnat. Cependant, une saison est à relever particulièrement, où les résultats seront assez probants. 1961-1962, une année à marquer d’une pierre blanche pour le basket toulousain.
Le Racing Club Municipal de Toulouse, créé après-guerre est l’émanation des clubs historiques du CA Colonne et de l’Etoile Rouge de Toulouse (champion de France FSGT 1938 et 1939). Ses débuts dans l’élite sont au mieux hésitants, voire poussifs avec des relégations et remontées successives. D’autres clubs régionaux lui dament aussi le pion régulièrement (Caraman et son terrain en mâchefer, les Cadets de St Etienne, patronage de la cathédrale du même nom qui officiera deux saisons dans l’élite entre 1951 et 1953).
Pourtant, la stabilité et le talent de l’effectif, porté par l’international Louis Bertorelle permet aux toulousains de faire un très bon championnat en 1961 (3ème de poule, quart de finaliste de la coupe de France). Grâce à ce résultat remarquable, le RCMT affiche des ambitions légitimes à l’entame de la saison 1961-1962. Le groupe est « managé » par René Piquemal, et dirigé lors des entrainements par l’incontournable Louis Bertorelle.
Parmi les joueurs les plus marquants de cette équipe, notons la présence du meneur de jeu Jean Luent, qui officiera plus tard comme entraineur d’Orthez et de l’équipe de France masculine, ainsi que de l’athlétique Max Joseph-Noël, premier international antillais. Relevons bien sûr la présence également de Michel Pfendt, d’origine Yougoslave, scoreur régulier de cette équipe toulousaine. De même, Toulouse peut compter sur l’apport d’un champion d’Espagne avec Barcelone (1959), Roberto Plana. Après Armando Maunier avant-guerre, c’est un nouvel international espagnol (une sélection), qui vient grossir les rangs d’une équipe toulousaine.
Bien équipé, le RCMT entame la saison 1961-1962 très correctement, engrangeant les victoires et se situant très vite dans le haut de tableau. En parallèle de leurs succès en championnat, les toulousains passent les étapes de la coupe de France une par une, ne laissant que peu d’espoirs à leurs adversaires de les accrocher. Ces résultats brillants permettent aux toulousains d’être redoutables et redoutés à mi-saison.
Ainsi, en janvier 1962, la JSA Bordeaux subit les assauts de Louis Bertorelle, qui avec ses 38 points qualifie Toulouse en 16èmes de finale (78-58). Une semaine après, grâce à leur victoire sur le SMUC (Marseille), le RCMT s’installe avec le PUC et Nantes en tête du championnat de France.
Le plus dur n’est pas d’atteindre le sommet, mais c’est d’y rester. Les toulousains mettent cet adage à l’épreuve, étant bousculés par leurs adversaires. Tours n’est pas passé loin de créer la surprise en n’échouant que de trois points (68-65) lors des 16èmes de finale de la Coupe de France. La « carence » des arbitres, comme relevé par la Dépêche du Midi a bien failli coûter aux toulousains leur place à l’étape suivante.
Pour l’étape suivante d’ailleurs, le RCMT retrouve l’une des meilleures équipes de première division, avec qui ils sont en lice pour l’obtention d’un titre de champion de France cette saison-là, Bagnolet. Gros morceau en perspective, un journaliste de la Dépêche du Midi relate l’annonce du tirage au sort aux joueurs toulousains:
Lorsque nous avons appris les rencontres de ces huitièmes de finale, nous sommes allés apporter la « bonne nouvelle » aux joueurs du RCMT qui s’entrainaient au Pré Catelan.
A l’annonce de Bagnolet, Jean Luent sauta de joie, Louis Bertorelle manqua son panier et tous les autres furent figés sur place.
Très exubérant, Luent estima pour sa part qu’il valait mieux tomber sur le « plus fort ».
« Nous connaitrons ainsi la véritable valeur de notre équipe. Et puis, si nous nous qualifions pour la poule finale du championnat, nous pourrons déceler leur point faible« .
Louis Bertorelle retrouva à son tour tous ses esprits et fut, somme toute, satisfait de revoir ses meilleures connaissances de l’équipe de France: Mayeur et Dorigo.
René Piquemal, enfin, souhaite pour sa part que le terrain neutre ne soit pas trop éloigné. « Bordeaux nous satisferait bien, par exemple, car nous voulons surtout protéger notre avenir en championnat« .
Et le terrain neutre retenu par la Fédération sera finalement Limoges. Ce match épique entre équipes de haut de tableau va voir la victoire des basketteurs toulousains face aux banlieusards parisiens 67 à 59, portés par un Michel Pfendt dominateur.
Notons par ailleurs la victoire de Denain au même stade de la compétition face au Coquelicot Lézatois, tombé avec les honneurs en terrain nordiste.
L’aventure de la Coupe de France continue donc pour les toulousains, en parallèle de leur très bon parcours en championnat de France. Selon les articles de l’époque, cette victoire permet au RCMT de provoquer le « choc psychologique » lui permettant de devenir un finaliste du championnat de France.
Avant de remettre le bleu de chauffe sur les deux tableaux, le RCMT profite de la trêve des vacances d’hiver pour recevoir, fin février, au Pré Catelan, la redoutable équipe de l’Etoile Rouge de Belgrade. Avec ses trois internationaux Radovan Radovic, Josip Djerdja et Sreten Dragolovic, l’équipe yougoslave se présente en favori de ce match de gala. Pour autant, sur la lancée de leur saison remarquable, les toulousains jouent crânement leurs chances et ne s’inclinent que de huit points, 72 à 64. Jean Luent (17 points), Michel Pfendt (16 points) et Louis Bertorelle (14 points) sortent du lot côté toulousain.
Après cet intermède prometteur, le RCMT se prend les pieds dans le tapis à la reprise du championnat, tombant face à la JSA Bordeaux, bien plus combattive. Par voie de conséquence, les toulousains rétrogradent à la quatrième place de la poule. A quatre journées de la fin du championnat, la qualification pour la poule finale peut être compromise, d’autant que le calendrier n’est pas évident.
Et le RCMT rebondit de la plus belle des manières, en écartant sans ménagement Nantes 80 à 52, puis le SA Lyon (75-55). Les quarante points en deux matchs de Michel Pfendt n’y sont évidemment pas pour rien dans la réussite toulousaine.
Sur leur lancée, les toulousains éliminent Auboué en quart de finale de la Coupe de France, 68 à 51, malgré l’absence pénalisante de leur meneur Jean Luent. Pour la première fois de son histoire, le RCMT accède à une demi-finale de Coupe, aux côtés du SA Lyon, mais surtout de l’ASVEL et du Paris Université Club.
L’accession aux demi-finales de Coupe de France acquise, il reste à en faire autant en championnat de France. La fin de saison se joue à couteaux tirés entre les différentes équipes susceptibles d’accrocher un strapontin aux phases finales. C’est ainsi que le RCMT dispose d’une équipe de Charenton accrocheuse, grâce à l’apport de Quintana, auteur de 23 points en l’absence de Luent et Bertorelle.
Plus qu’une rencontre face à St Etienne début avril 1962 pour se qualifier en demi-finales du championnat de France première division. Mais avant cela, place aux derniers moments de la Coupe de France.
Limoges accueille à nouveau les toulousains dans sa course à la Coupe. L’adversaire du jour n’est autre que le SA Lyon, dont ils avaient disposés facilement quelques semaines auparavant en championnat.
Rebelote, les lyonnais ne peuvent que s’incliner face à l’efficacité des pivots Pfendt (22 points) et Joseph-Noël (16 points), la grinta de Jean Luent (13 points) et l’efficacité de Quintana qui pallient les difficultés de Louis Bertorelle sur cette rencontre.
En route pour la finale!
Mais avant cela, encore un retour à la réalité du championnat. Toulouse reçoit l’AS St Etienne dans un Pré Catelan pris d’assaut par les spectateurs. Ce match est capital pour l’obtention d’une dernière place dans le carré des demi-finales du championnat de France. Une défaite et tout s’arrête, une victoire et on peut encore espérer disputer le titre.
Et la pression du résultat se fait ressentir dans l’incapacité du RCMT à tuer le match. St Etienne s’accroche vaillamment, mais ne peut au final que rendre les armes à l’issue d’un match très disputé (59 à 54)
.
Nous sommes en avril 1962, et le RCMT est finaliste de la Coupe de France, et demi-finaliste du championnat de France première division!
Avant de disputer le dernier carré du championnat, les toulousains se rendent à Rennes, ville hôte de la finale de la Coupe de France. Ils retrouvent en finale le Paris Université Club, une redoutable équipe, dominant le championnat de France. Au sein de l’effectif, nous retrouvons notamment André Souvré et André Michi, qui accompagneront le Toulouse Université Club en première division six ans plus tard. Pour autant, les toulousains veulent ramener un trophée à la ville rose, et Bertorelle confie à la Dépêche qu’il n’appréhende nullement ce match.
Il est regrettable seulement que je sois en petite condition physique après mon début de jaunisse, tout comme Jean Luent, du reste, sinon, croyez-moi, le PUC souffrirait.
Je ne mésestime pas nos chances malgré tout, car Pfendt n’a jamais connu une forme si brillante. Il vaut actuellement dix points de plus que n’importe quel centre. Aussi, devant Michi, si notre Michaël le « contre », il y a de fortes chances que la partie change de physionomie

Finale de la Coupe de France (8 blanc André Souvré, 15 rouge Roberto Plana, 7 rouge Louis Bertorelle) – Collection personnelle d’André Souvré
Et Louis Bertorelle a raison: Toulouse rentre tambour battant dans la rencontre menant à la mi-temps 40 à 34. Mais les Pucistes, menés par Michel Rat et André Souvré résistent et permettent à leur équipe de rester au contact de toulousains survoltés. La deuxième mi-temps est quant à elle dominée par les parisiens, qui bénéficient des sorties pour cinq fautes de Pfendt (28 points) et Bertorelle (3 points). L’international Roger Antoine et André Michi achèvent tout espoir de retour des toulousains, avec 18 points chacun. Le PUC remporte la Coupe de France 65 à 57, face à des toulousains accrocheurs.
Une courte vidéo du match est consultable au lien suivant:
La défaite digérée, il est temps pour le RCMT de se projeter vers de nouvelles échéances, les demi-finales du championnat de France. Celles-ci les opposent à l’Alsace de Bagnolet, qui avait chuté face à Toulouse lors des huitièmes de finale de la Coupe. Comme un air de revanche…
Pour le match aller de ces demi-finales, disputé devant 1900 spectateurs au Pré Catelan, le RCMT ne fait pas de détails et s’impose de treize points face à Bagnolet (75 à 62). La marque répartie des toulousains montre que le danger vient de partout (Joseph-Noël 11, Bertorelle 14, Pfendt 18, Quintana 10, Luent 14, Plana 6, Muquet 2). Malgré les 27 points de Maxime Dorigo, Bagnolet ne peut contenir les assauts d’un collectif toulousain dominateur. De bonne augure pour le match retour à venir…
Mais avant de retrouver le PUC en finale du championnat, pour faire le remake de la finale de la Coupe, le RCMT doit se rendre à Bagnolet et conserver ses treize points d’avance.
Las, ce ne sera pas le cas, et Toulouse va s’incliner dans les grandes largeurs 74-47. C’est la première fois de la saison que le RCMT perd un match avec tant d’écart. Malheureusement, c’est un match couperet. René Piquemal, le manager de l’équipe, déclarera à la fin de la rencontre à la Dépêche, « fumant cigarette sur cigarette »:
Déçus, oui, nous sommes déçus. Notre équipe s’est comportée comme une équipe qui arrive au bout du rouleau. C’est donc fini. Nous ne jouerons plus que quelques matches amicaux.
Mais René Piquemal oublie qu’il ne reste pas que des matchs amicaux: le RCMT a encore une chance de remporter un trophée, certes moins prestigieux que la Coupe de France ou le titre de Champion de France: le Championnat des Pyrénées!
Opposés à Lézat, auteur d’une belle saison (champion régional d’Excellence, accède à la division nationale honneur, et 8ème de finaliste de la Coupe de France), les toulousains ont les crocs. Les ariégeois, malgré un très bon Boyer auteur de 30 points, ne peuvent tenir qu’une mi-temps face à l’armada du RCMT, qui l’emporte 98 à 60.
Le RCMT se contentera de ce titre lors de cette saison en tout points remarquable, tandis que leurs bourreaux en demi-finale écarteront le PUC en finale du championnat de France (66 à 57). De quoi laisser des regrets aux toulousains qui auraient pu, peut-être, prendre leur revanche s’ils avaient su conserver leur avance du match aller de la demi-finale.
On ne le sait pas encore, mais cette saison reste à ce jour l’une des plus abouties du basket toulousain, qui va rentrer dans le rang les saisons suivantes, avant de disparaitre des radars de l’élite et connaitre une longue traversée du désert…
Quelques portraits de joueurs du RCMT 1961-1962
[…] sur le basket toulousain, un retour sur l’année 1962, qui est à marquer d’une pierre blanche avec un excellent résultat en championnat et une finale en Coupe de France face au PUC […]
Super publication qui relate les heures de gloire du Racing Club Municipal de Toulouse avec des récits réalistes et conformes aux descriptifs de cet évènement de la saison 62 assorti de documents photographiques « collector » et d’anthologie ! ! Félicitations aux auteurs de cette magnifique parution qui me rappelle ma période estudiantine dans la Cité des Violettes .
Merci pour votre témoignage Francis, c’est un honneur d’avoir un commentaire de l’ancien sélectionneur de l’équipe de France!
[…] neveu de Louis Bertorelle, l’ancien international qui a fait les beaux jours de Caraman et du RCMT dans les années 50 et […]
[…] suivante, avec l’accession en N1B. C’est la première coupe remportée par le RCMT, après un échec face au PUC d’Henry Fields et André Souvré en 1962, qui sera suivie d’une autre en 2018 par leurs descendants du […]
J etais au club du rmc de 1959 à 1962 en équipe 2 entraîneur Mr Mauloubier. Je m en traînais avec cette equipe magnifique de bertorelle pfent luent maurette minelli et J ai passé de très bons moments au pré catelan. Longue vie au club